Vendredi matin on était dans le jardin avec nos pains au chocolat, j’aurais dû aller aider ceux qui s’activaient depuis déjà deux heures, mais je crois que j’avais la bénédiction du monde entier pour prendre ce moment, le donner entier à M, et en recevoir toute la douceur. Force tranquille, souple et ferme, inaliénable douceur qui me protège.
Personne n’a le droit de me blesser mais la violence impose parfois la déchirure. Et comment reprendre pied ? Comment supporter cette douleur là ? Il y a des alliés qui m’entourent, il y a le refuge de la grande maison en pierre et les champs traversés sous le soleil avec Noroise, mais il n’y a qu’une chose à laquelle je sais me donner, en espérant me sauver : aller vers les autres. Retenir ceux qui vont encore plus mal que moi. Cacher les larmes contre ma poitrine quand les miennes sont à peine séchées. Jouer (encore, toujours jouer) à être la plus forte pour ne pas que crève la bulle qui enferme les mots « je suis la plus faible ». Au bout de la nuit, après des journées d’épuisement, alors que j’aimerais comme d’autres me laisser aller aux bras des garçons dans la grande obscurité sensuelle des discothèques, je suis là, every and each time, pour être celle qui soutient. Mon mal à moi se tait derrière celui des autres.
Parfois il y a un retour de ces mêmes personnes, parfois il n’y en a pas. Mais je crois, je sais, je suis presque sûre d’avoir les meilleurs appuis à mes côtés. Personne ne me laissera m’effondrer, il y aura quelqu’un, et je serai là aussi pour toi, et tout se tient. C’est infernal.
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