mercredi 20 octobre 2010

Oubli du corps.


Je sais il est tard je devrais dormir je ne devrais pas écrire. Mais arrivée à moment de la nuit je me dis que me coucher à 3h30 ou à 4h ça n’a plus grande importance. J’ai seulement envie d’écrire. Il fait froid dans mon lit. La lumière de l’écran fait ressortir la peau qui a la chair de poule. La peau douce. Ce soir j’ai vu par hasard mon épaule sans tissu dans une glace. J’ai regardé l’épaule. La peau dorée. La peau lisse. Je n’avais pas vu, pas regardé mon corps depuis tellement de semaines. Je l’avais oublié mon corps. Je vais devoir me le réapproprier. J’ai regardé la peau, la couleur, la sensation, l’épaule, la clavicule, les seins gonflés, les bras fins. J’ai découvert qu’à force de maigrir, j’avais juste l’air plus fine, l’air fragile, l’air d’une fille aux jambes longues et aux cheveux longs. La bague autour de mon doigt s’agite, l’anneau est trop grand. Pendant des semaines j’ai oublié mon corps, j’ai oublié de manger, j’ai oublié de dormir. Je mange à nouveau. Je ne dors pas plus. J’ai froid souvent. Je refume à nouveau et beaucoup, Dunhills courtes et light à filtre blanc. J’ai envie de passer une soirée à boire avec mon amour en vidant des paquets de cigarettes. On savait faire ça très bien. J’ai dans la tête les images de nous au Petit Suisse (politique et éducation), au Flore (« au fur et à mesure on s’embrasse de mieux en mieux »), au Vieux Colombier (famille, parents, l’appartement vers la Madeleine). Le premier soir nous étions allés aux Editeurs et à la Soif. Tout ce dont nous avions parlé. Toute ma vie que j’avais donnée. Tous les sourires, toutes les douceurs, et se quitter devant la bouche béante du metropolitain, ne pas s’embrasser, attendre le lendemain.

Je vis encore dans cet amour, c’est évident. On me parle du temps, du temps qui effacera, du temps qui mènera vers l’oubli. Comme au premier jour de juin, pourtant, je suis folle amoureuse. Loin de lui je peux rester des mois, et refuser tous ceux qui viennent, tous ceux qui ne parviennent pas à réveiller mon corps, tous ceux à qui j’oublie de répondre. Je suis encore donnée à mon amant. Je ne peux accepter personne d’autre. Ca n’annule pas tout ce que j’ai dit sur la colère, la tristesse et la douleur infinies du champ des possibles et de l’amour fou refermés ; je m’éloigne, je me reconstruis, je réapprends sans lui. Mais l’amour ne s’en va pas. L’amour réclame des semaines pour me quitter.

Et je m’endors.

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