dimanche 19 septembre 2010

London calling.

London calling.


Assez de vouloir dire si je suis heureuse ou pas, si je vais bien ou pas, assez de ces mots là qui ne font pas sens, assez de vouloir savoir si je m’en suis sortie, ou pas – c’est tout à la fois, c’est un matin l’angoisse et un soir la légèreté, c’est un grand creuset en moi pour tout recueillir – la fatigue de toutes les nuits trop courtes, le bonheur immense de trouver autour de moi des alliés si rassurants, l’amour fou, le dégoût, la colère, l’angoisse violente. Je croyais aller mieux. Je disais : oui voilà je suis sortie de la rupture. Je me sens plus sereine. Je ne pleure plus chaque nuit. Nos crises se sont espacées, nous n’avons plus la force ni l’un ni l’autre de nous perdre dans ces affrontements. Mais hier soir dans la grande maison superbe cachée au fond de l’allée – indécente de tant d’élégance au coeur de Paris, à quelques pas de l’église d’Auteuil, chez moi il y a quelques années – j’ai senti que la vodka allait me rendre triste. J’ai senti l’énorme pieuvre de la mélancolie venir m’agripper le coeur, plonger dans la masse rouge pour attraper les fibres, serrer, presser, comprimer – j’ai fini par avoir tellement mal, et le regarder lui si jeune, la peau si claire, les cheveux si foncés, les mêmes remarques, le même humour noir, il parle de son ami mon amour à Londres, et moi ça me chavire, moi ça me blesse et c’est une lame de plus plantée dans mon coeur masse palpitante qui saigne saigne saigne – ça se referme parfois, ça cicatrise, et de mieux en mieux la plaie s’assèche, mais encore de temps en temps lorsque je vais trop loin dans les rires, lorsque j’ai les veines parcourues par le liquide sans couleur qui a brûlé la gorge au moment de tout avaler sans reprendre ma respiration, je sens la tristesse morbide s’amarrer et sucer ce qu’il me reste d’énergie pour faire semblant – alors je m’assois sur un canapé parmi d’autres, je regarde les catalogues d’expos posés sur la table du salon, Klimt, de l’art contemporain, et bien sûr je tombe sur le livre consacré à Monet, Whistler et Turner – à Londres le mois dernier avec lui j’ai vu les aquarelles de Turner, toutes les aquarelles de Venise, et personne n’a vu comme l’eau des aquarelles venait à mes yeux, dans le salon enfumé, rempli de rires, personne n’a vu.

Je me sens mieux et puis ce matin, en me levant à 6h45, j’ai senti les larmes dans mes yeux, les larmes du sommeil, celles qui gonflent les yeux. L’angoisse était là, revenue, tapie, je voulais ses bras pour me rendormir, son odeur et sa peau contre moi, je pleurais et j’avais mal dans la poitrine, lui lui lui que je voulais immédiatement pour me redonner confiance, pour me faire affronter la journée, tout de suite je lui ai écrit j’ai dit le mal la souffrance et il a été là, si doux, si parfait comme je l’aime, et je sais que je n’arrête pas de l’aimer, que si des choses sont abîmées parce que nous nous sommes fait du mal au travers de la rupture, mon amour ne s’interrompt pas. C’est terrible. J’aimerais qu’il y ait une solution, j’aimerais ne plus l’aimer, ne plus connaître ces crises d’angoisse, j’aimerais penser à mon amoureux en balade dans le Sud et ne pas attendre le retour de mon amour londonien – pourtant je le lui ai dit : peut-être que je n’arrêterai pas de l’aimer, peut-être que dans cinq mois je serai là encore plongée dans l’attente et l’espoir, mais quelle horreur, pourquoi est-ce que je ne peux pas accepter qu’il ne soit plus là, qu’il ne m’aime plus, qu’il m’ait quittée ? J’aime malgré lui, j’aime malgré moi, j’aime contre ma propre volonté et tout m’échappe.

Autrement, dans la nuit obscure de l’écriture, j’écoute Led Zep, Joy Division, The Clash. Oui d’accord j’ai Londres dans la peau. London is calling.

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